Pelé, icone du football brésilien

Même pour celles et ceux peu au fait des choses du ballon rond, il n’a pas échappé que le Brésil incarne LA nation du football, au même titre de la Nouvelle-Zélande est le pays du rugby.

Cette identification jamais démentie remonte en fait à la fin des années soixante, lorsque le Brésil devint en l’espace de quatre éditions triple vainqueur de la Coupe du Monde. Une équipe est un tout, une vingtaine de joueurs avec les remplaçants, mais un explosa particulièrement de toute son exceptionnelle classe lors de cette épopée historique : Edson Arantes do Nascimento, universellement connu sous le pseudonyme de Pelé. Nous vous proposons de découvrir un peu plus ce grand sportif dans notre rubrique actu sport au Brésil.

Pelé taclé sur la pelouse du stade, photo noir et blanc.

Les débuts du phénomène brésilien du Ballon Rond

 

Jusqu’à la coupe du Monde 1958 organisée en Suède, le Brésil n’était pas plus qu’un autre synonyme de ballon rond. Le monde entier jouait au football, jeu aux règles simples pouvant être comprises autant par un étudiant que par un gamin sorti d’un bidonville. Le pays n’avait jamais gagné la Coupe du Monde, et ne pouvait afficher comme maigre palmarès international que la finale de 1950, perdue à domicile face à l’Uruguay. En 1957, l’équipe nationale du Brésil – la fameuse Seleção – sélectionna le jeune Edson, un gamin d’à peine 17 ans qui se distingua de la meilleure des manières en marquant son premier but international lors de son premier match dans l’antre du fameux Maracanã à Rio. Le fait que l’adversaire ce jour-là fut l’ennemi préféré du Brésil, l’Argentine voisine, n’en eut que plus de saveur. Mais surtout le fait que ce « Pelé » tout juste sorti de son club du Santos FC représentait à lui seul tout ce qu’un joueur de football idéal pouvait proposer propulsa immédiatement le jeune homme dans l’antichambre de l’Olympe footballistique. La Suède l’année suivante allait faire le reste.

Pelé et Sandro Mazolla

Pelé: révolution du football en coupe du monde

 

Blessé en début de compétition, Pelé n’entra sur le terrain qu’en quart de finale, et ne joua donc que trois matchs. Mais il marqua la bagatelle de six buts lors de ces rencontres, dont un doublé en finale contre la Suède ! La Coupe du Monde commençait à être largement médiatisée, et c’est ainsi que les Français, pourtant archi confiants en leur équipe emmenée par le brillant trio Fontaine-Kopa-Piantoni, assistèrent sidérés au festival Pelé en demi-finale qui inscrivit un triplé participant à la qualification du Brésil pour la finale.

Le monde entier découvrit lors de ces retransmissions ce joueur fin et athlétique à la fois, anticipant comme personne d’autre le jeu adverse, et osant des gestes techniques alors très peu pratiqués, comme le coup du sombrero (passer le ballon par-dessus la tête de l’adversaire pour ensuite le récupérer) ou le grand pont (passer le ballon d’un côté de l’adversaire tandis que le joueur passe de l’autre côté).

Initialement attaquant pur, Pelé va adopter le rôle valorisant d’un milieu de terrain omnipotent, celui qui sait marquer mais qui sait également faire la passe décisive au moment adéquat. En quelques petites années, il va devenir LA référence absolue du football. A tel point qu’il devint également la cible favorite des joueurs adverses, l’homme à abattre.

En 1966 lors de la Coupe du monde en Angleterre, le jeune joueur déjà auréolé de deux titres de champion (même si en 1962, il n’a pratiquement pas joué, s’étant blessé lors du match d’ouverture) va même être victime d’agressions manifestes de la part d’adversaires n’ayant pas la même classe à faire valoir. Cet état de fait peu – voire non – sanctionné par le corps arbitral de l’époque, allié à l’élimination prématurée du Brésil, apprit beaucoup au jeune joueur sur les vanités terrestres. Il se vengea quatre ans plus tard en décrochant une troisième étoile au Mexique, devenant ainsi le seul joueur à être champion du monde à trois reprises. Au jour d’aujourd’hui, il l’est toujours.

Pelé et 2 joueurs de football américain des quiksilvers

Pelé, incarnation du beau jeu « à la brésilienne »

 

Pelé fut aussi un joueur multi récompensé au plan national. Avec son club historique, Santos FC, il enleva par deux fois la Coupe Intercontinentale ainsi que la Copa Libertadores (1962 et 63 chacune), et le championnat de São Paulo à onze reprises (il n’y avait pas alors de championnat national au Brésil). Ajoutons en fin de carrière le championnat des Etats-Unis avec le Cosmos de New York, et on aura un tour d’horizon relativement complet des faits d’armes de ce phénomène sacré « Athlète du siècle » par le CIO et « joueur du siècle » par la FIFA. Son palmarès est certes exceptionnel, mais c’est sur autre chose que Pelé est surtout devenu – et reste – LA légende mondiale du football : il savait tout faire, et ce de la plus belle des manières.

Si l’équipe du Brésil est synonyme de « beau jeu » depuis des lustres, c’est en grande partie à Pelé qu’elle le doit : il était fin et puissant à la fois (malgré une petite taille), maître des airs et canonnier hors pair quand il le fallait, tacticien en diable et anticipateur des mouvements de l’adversaire. Le tout avec une grâce et une gestuelle artistique que personne, même les plus grands, n’ont jamais pu approcher. Pelé était unique dans son omnipotence sur le terrain et, hormis les mesquines bassesses évoquées plus haut, ceux qui durent l’affronter ne tarirent pas d’éloges à son sujet. Le défenseur italien Tarcisio Burgnich déclara à l’issue de la finale de Coupe du Monde perdue contre le Brésil en 1970 : « Avant le match, je me disais : il est en chair et en os, comme moi. J’ai ensuite compris que je m’étais trompé ».

Pelé porté en liesse lors de son dernier match à New York.

Le roi immortel du football mondial

 

La star brésilienne attirait l’empathie et le rendait bien : à toutes les qualités évoquées, il faut ajouter le respect et le fairplay, que n’eurent certainement pas ceux qui en Angleterre en 1966 ne pensèrent qu’à l’éliminer du terrain. Lorsqu’il annonça sa retraite sportive en 1977 lors d’un match de gala au Giant Stadium de New York, ses coéquipiers portèrent en triomphe sur leurs épaules l’icône en larmes tout autour d’un stade en totale symbiose avec l’unicité du moment vécu. Pour tous, et pour toujours, il serait le « Roi Pelé ».

Jusqu’à la fin, il sut conserver sa vista dans le jeu et ses qualités athlétiques exceptionnelles qui le préservèrent des graves blessures. L’ONU et l’UNESCO n’hésitèrent pas une seconde à le nommer ambassadeur auprès des populations défavorisées dans les domaines de l’éducation et de l’environnement. Quant au président du Brésil démocratiquement élu Fernando Cardoso, il lui confia en 1995 le portefeuille de ministre des sports avec pour mission de réorganiser, et mettre de l’ordre dans,  la maison du football brésilien (Pelé fit notamment voter une loi, après un rude combat contre les présidents de club et la Fédération Brésilienne, permettant à un joueur de jouer où bon lui semble).

Le Brésil compte nombre de joueurs qualifiés de « légendaires » dans sa riche histoire du futebol, de Garrincha à Ronaldo en passant par Zico, Socrates, Romario ou Cafu. Mais aucun n’a jamais obtenu le quart de l’aura qui cernait le personnage de Pelé. Si l’on excepte Arthur Friedenreich dans les lointaines années vingt, le milieu de terrain que le monde entier enviait fut le premier à exploser internationalement et sa gloire personnelle rejaillit sur celle de son équipe avec laquelle il acquit les trois premières des cinq étoiles mondiales que les Auriverdes arborent désormais sur leur maillot vert et jaune.

Pelé fait partie de ces météores exceptionnels qui sont à tout jamais l’incarnation de leur sport, comme Fangio le fut pour l’automobile ou Killy pour le ski. Le football mondial ne compte plus ses pépites, nombreuses, les Cruyff, Maradona, Platini, Beckenbauer, Kopa, Messi, Zidane, Best ou autres Baresi. Tous on rêve ou rêvent d’un jour de dépasser le maître  et le dernier brésilien en lice, le polémique Neymar n’est pas en reste. Mais il n’y aura jamais qu’un seul roi. Pelé !

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