São Paulo,
refuge des grandes fortunes brésiliennes
Malgré sa pauvreté endémique, le Brésil est aussi le pays où les riches le sont à un niveau difficilement imaginable, vu de notre fenêtre européenne. Même si tout le monde n’en touche pas les dividendes directs, l’activité économique est florissante et ses revenus ont fait grimper les prix dans toutes les grandes villes. Mais celle qui résume le mieux cette effarante dichotomie est sans conteste possible São Paulo.
São Paulo: cœur économique et citadelle des milliardaires du Brésil
São Paulo a bâti son essor dès le XVIIIe siècle grâce aux mines d’or, puis au XIXe grâce à la culture du café et de la canne à sucre. Ville extrêmement cosmopolite, elle a su rassembler tous les gens désireux de faire des affaires sur cette partie du continent sud-américain si prometteuse.
Plus grande mégalopole du Brésil, São Paulo en est la capitale économique, non loin de Rio de Janeiro, deuxième ville du pays et considérée comme la capitale touristique. Tous les grands complexes industriels brésiliens, automobile, pétrole, métallurgie, commerce, aéronautique, agro-alimentaire, ont leur siège à São Paulo. Les grandes entreprises internationales sont elles aussi basées au cœur de cette cité tentaculaire. La bourse de São Paulo rythme la vie économique du pays et le PIB de la ville est le plus important de l’Amérique Latine. En toute logique, la classe des plus fortunés y est très représentative de ce que peut être la richesse dans un pays en voie de développement comme le Brésil.
On a coutume de dire que le Brésil incarne à lui seul dans sa population la répartition des richesses sur la planète. A São Paulo, cette répartition est encore plus exacerbée dans son gouffre entre les plus pauvres et les plus riches. Si l’on admet en général que l’écart dans une ville européenne entre les classes les plus et les moins défavorisées va de 1 à 10, il grimpe de 1 à 100 au Brésil, et plus particulièrement à São Paulo ! Et, phénomène amplifié depuis des années, l’écart des richesses se creuse très nettement si on se focalise sur le centre de São Paulo, les extérieurs de l’agglomération et l’état de São Paulo lui-même étant moins disparates en terme de niveau de vie. Plus qu’ailleurs, les très pauvres côtoient les extrêmement riches. Enfin, employer le verbe « côtoyer » dans ce cas précis relève plutôt d’une litote assez subtile.
L’hélicoptère, transport roi du life-style des grandes fortunes brésiliennes
Le Brésil est un pays essentiellement citadin : plus de 80% de la population vit dans les villes. De fait, les prix pour se loger explosent (São Paulo est la dixième ville la plus chère au monde) et seuls les plus riches arrivent à y vivre, de façon décente pour la classe moyenne, et somptuaire pour la classe des millionnaires et milliardaires. Car São Paulo est la ville des nababs, qui ont fait fortune dans l’agriculture intensive, la canne à sucre le pétrole, les banques ou l’immobilier. Ces gens habitent en général au centre de São Paulo, qui est une zone très vaste comprenant le centre-sud, le sud-est et l’ouest, enfermés dans les ors et apparats de structures hermétiquement closes qui les coupent définitivement de toute réalité sociale. D’où l’incongruité d’employer le terme de « côtoyer » en parlant des plus riches et des plus pauvres.
Les millionnaires représentent une minorité de la population pauliste, mais se comptent malgré tout en centaines. Au sommet de la pyramide, on trouve pas moins de 43 milliardaires, selon Forbes en 2017. Ils habitent principalement dans des villas dignes des rêves les plus fous, aux murs infranchissables, ou bien dans de somptueux appartements de plusieurs centaines de mètres carrés, avec vue imprenable sur l’immensité de la ville et accès direct – et sécurisé – vers les centres commerciaux ou sportifs situés au pied des tours dans des environnements de végétation luxuriante. Le fameux Quartier des Jardins, situé dans l’ouest du centre-ville non loin du parc Ibirapuera, est complètement représentatif de ce genre d’ensemble verrouillé à quiconque n’a pas le code d’accès à ces lieux privilégiés. Leur isolation du monde fait d’ailleurs avouer à certains habitants de ces résidences ne pas avoir mis les pieds dans la rue depuis plusieurs mois !
Conçu comme une sorte de Beverly Hills brésilien, cet ensemble de tours et villas luxueuses et ultra modernes abrite des gens vivant en vase totalement clos. Toutes leurs activités de loisir se passent dans des clubs ou des shopping malls uniquement accessibles depuis les résidences du quartier, les déplacements se faisant depuis des sous-sols sécurisés dans des berlines haut-de-gamme, mais surtout en hélicoptère.
São Paulo possède la première flotte d’hélicoptères du pays, et la deuxième au monde après New York, l’état de São Paulo détenant à lui seul près de la moitié des hélicoptères du Brésil ! Ce moyen de transport, onéreux mais extrêmement pratique et rapide, est évidemment adopté par tous ceux qui ont les moyens de se le payer. C’est un outil de travail qui permet de gagner un temps précieux (surtout quand on connaît la densité hallucinante des embouteillages dans l’agglomération), et donc de l’argent dans les affaires. Et puis, quoi de mieux que de rallier la plage le week-end en 20 minutes plutôt qu’en trois heures de bouchons inextricables, même dans l’ouate climatisée de sa berline allemande ou de sa supercar italienne !
L’insécurité extrême dans certains quartiers de la mégalopole explique en grande partie ce cloisonnement entre pauvres et riches. Les premiers ont été repoussés dans les favelas des quartiers périphériques, amenant naturellement les seconds à s’établir au centre dans ces îlots de luxe conçus par les cabinets d’architectes et de designers ultra sélects aux carnets de commandes remplis pour des années et des années.
São Paulo ne se résume pas seulement à ses habitants fortunés. Mais sa richesse intrinsèque en fait une vitrine culturelle sur le monde, grâce son musée d’art, sa pinacothèque d’état et son mémorial de l’Amérique latine dessiné par Oscar Niemeyer, ainsi qu’une ville de manifestations qui accueille chaque année un des plus grands défilés gay au monde, ou encore la course de la Saint-Sylvestre, sans parler du très médiatique Grand Prix de Formule 1 qui se déroule sur le circuit d’Interlagos.