Qui n’a jamais été séduit par la résonance exotique du nom de Bahia ? De par son histoire, cet Etat du nord-est brésilien est à la fois passionnant et inspirant. Véritable carrefour culturel, Bahia c’est avant tout une culture africaine exceptionnelle, et ce jusque dans ses assiettes ! Sa cuisine fait partie des plus connues au Brésil, et c’est amplement mérité. Savoureuse, généreuse, colorée et typique, elle fait le bonheur des locaux et transcende le palais des touristes. La gastronomie bahianaise ne laisse personne indiférent. Lait de coco, gingembre, piment, dendé, poissons, fruits de mer et manioc constituent les éléments de base des plats traditionnels bahianais. Riche de sa kyrielle ethnique, la cuisine brésilienne renvoie également à des pratiques sociales et culturelles historiques. Un voyage dans l’Etat de Bahia, se vit au rythme de la musique, au fil des découvertes, et surtout à l’heure des repas. Vous comprendrez très vite pourquoi on le surnomme “l’Etat du bonheur”. Découvrez tous les recoins de cet Etat brésilien plein de charme dans nos circuits dédiés.
Situé sur la côte Atlantique, Bahia est l’état le plus au sud du Nordeste brésilien et une des plus grandes régions du pays. Bahia signifie “baie” en portuguais, ce qui fait référence à la Baia de Todos os Santos ( “Baie de tous les Saints” car elle fut découverte un 1 novembre, jour de la Toussaint), la plus grande baie du Brésil, et l’une des plus vastes du monde. Elle compte au total 56 îles. Entre mer, montagne et forêt, ses paysages sont exceptionnellement nuancés, et toujours paradisiaques.
La grande majorité de son territoire est située à 200 mètres d’altitude environ et jouit d’un climat tropical atlantique. Bahia est régulièrement alimentée en eau grâce à de légères pluies qui ponctuent les chaudes journées et arrosent sa végétation luxuriante, emblème de cette magnifique région. En effet, la majeure partie du littoral bahianais est bordé par la forêt atlantique, une jungle impressionnante, de par sa taille et la richesse de ses écosystèmes, qui abritent des espèces endémiques.
Sa capitale, Salvador de Bahia, est un des sites historiques et culturels majeurs du pays car elle à été la toute première ville d’importance des colons portugais. Son patrimoine architectural est un voyage à lui seul, qui nous transporte en quelques pâtés de maisons dans un Brésil colonial anachronique. Ses rues et venelles sont marquées d’une atmosphère douce, souvent rehaussée par des airs de samba reggae, de batucada, ou de pagode, et toujours parfumées de la douce odeur des acarajés frits dans l’huile de dendé. Il fait bon vivre dans cette ville festive et colorée chargée d’histoire. Explorez le mythique quartier de pelourinho dans les hauteurs de la ville. Une balade au cœur de ses artères entièrement pavées sera l’occasion d’admirer les nombreuses petites maisons polychromes typiques de la période de la Renaissance, mais aussi de visiter les églises baroques disséminées un peu partout. La plus célèbre est la Igreja e Convento de Sao Francisco. Construite au XVIIIe siècle, elle est parée de pas moins de 800 kg d’or qui ornent tout son intérieur, la visite est impressionnante. Pour la petite histoire, la place principale du pelourinho (pilori) était l’endroit où les esclaves étaient punis publiquement. Aujourd’hui, c’est un lieu festif, de rencontre, où la musique bat souvent son plein et les petits vendeurs ambulants foisonnent pour déguster quelques mets typiquement bahianais sur le pouce. Salvador est une ville construite en hauteur, elle compte beaucoup de ladeira (colline/pente), la balade est donc souvent sportive mais le décor en vaut la peine.
Il est impossible de découvrir Bahia sans évoquer son histoire, à l’origine de son héritage gastronomique contemporain. En raison de sa localisation stratégique pour le transport et l’acheminement de marchandises, Salvador fut la toute première capitale du Brésil. Point de convergence entre l’Europe, l’Afrique et le Nouveau Monde, ce sera également le premier marché aux esclaves du pays en 1558. Lieu de transit entre l’Extrême-Orient, l’Afrique et les champs de cannes à sucre brésiliens, le sol de Bahia porte les stigmates de l’esclavagisme qui dura pendant près de 3 siècles.
Capturés dans différentes régions d’Afrique de l’Ouest, les esclaves avaient à l’origine des cultures et coutumes très différentes. Mais les colons portuguais prenaient très souvent le soin de séparer les personnes venant du même pays.
Mais l’écho de cet historique sordide s’est transfiguré en une multiculturalité hors du commun. Aujourd’hui, 80% des 3 millions d’habitants de Salvador sont d’origine africaine ou de descendance noire, et c’est ce brassage qui a donné naissance à un métissage religieux et gastronomique unique au monde que nous a décrit l’anthropologue Pierre Verger. Visiter Salvador est un voyage passionnant, à la rencontre d’une âme hybride et authentique. Surnommée la “Rome noire”, Salvador témoigne aujourd’hui avec une grande fierté de ses racines africaines.
Séjour nature, culturel ou festif, l’Etat de Bahia est une destination brésilienne aux multiples attractions, la première d’entre elle étant sa nourriture haute en saveurs et en couleurs ! Découvrez cette région afro-brésilienne envoutante dans vos assiettes.
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La gastronomie bahianaise, forte de ses influences africaines
A Bahia, pendant plus de trois siècles, tous les repas de la société brésilienne étaient confectionnés par des mains venues d’Afrique. Au départ d’ingrédients souvent issus des restes des maîtres, de nombreuses recettes originales ont vu le jour et ont été ensuite enrichies et perfectionnées pour devenir les délicieuses préparations que l’on connait aujourd’hui. C’est une cuisine de fusion qui s’est donc instaurée dans toutes les assiettes bahianaises au fil des siècles. Les spécialités traditionnelles sont souvent des ragoûts ou des plats en sauce, qui permettent d’être servis et partagés aisément.
Côté ingrédients, on retrouve encore les influences africaines dans leurs sélections et leurs associations.L’assaisonnement est souvent fort, ce qui n’est pas commun pour le reste de la gastronomie brésilienne, et l’huile de palme traditionnelle appelée dendê, qui n’a rien à voir avec celle utilisée par l’industrie agro alimentaire, est quasi omniprésente dans chaque préparation de plats typique bahianais. Lait de coco, épices, manioc, gingembre, arachide, pimenta de cheiro…. la cuisine bahianaise est parfumée, relevée. Les crevettes sèches, déshydratées et fumées sont très courantes dans les recettes typiques de Bahia car c’est une très bonne technique de conservation.
Le dendé, un ingrédient central de la cuisine de Bahia
Les bahianais parlent souvent de “cuisine dendé” pour qualifier leurs plats. Le dendé est un aromate très populaire à Bahia. Si vous vous demandez encore ce que c’est, et bien c’est tout simplement de l’huile de palme ! Aujourd’hui, c’est l’une des huiles les plus cultivées au Brésil, mais de manière traditionnelle et la deuxième la plus consommée au monde dans sa version industrielle hydrogénée. Elle contient une certaine quantité de gras saturé mais est très riche en vitamine A et E et possède un pouvoir antioxydant surprenant. Issu du dendezeiro, un arbre de type palmier, c’est uniquement la pulpe du petit fruit orange qui est travaillée pour obtenir l’huile.
Le dendé est généralement dilué dans les plats car son goût est assez prononcé, une grosse quantité risquerait de camoufler les autres saveurs. Son rôle est de donner aux plats couleur, parfum et consistance. Le dendezeiro n’est pas une plante brésilienne. Elle fut importée des côtes du Golfe de Guinée par les européens aux débuts de la colonisation. Mais cette huile n’est pas pour autant une invention guinéenne. On a retrouvé des traces de son utilisation aux temps des Égyptiens, il y a plus de 5000 ans. La région de Bahia est idéale pour la culture du dendezeiro. La diversité de ses sols et son climat exceptionnel lui confèrent une aisance dans sa culture et sa commercialisation.
Le dendé est incorporé dans énormément de recettes bahianaises au Brésil. Les fameux acarajé sont frits dans cette huile, le bobo de camarao trouve sa texture si onctueuse avec quelques cuillères, de la même manière que la moqueca de peixe ou la vatapa. Il serait dommage de ne pas également évoquer la farofa de dendé, une épice locale artisanale faite de farine de manioc, d’un peu d’oignons et de dendé, un délice qui réveille n’importe quel plat !
Le dendé c’est l’élément indispensable de la gastronomie afro-brésilienne, il vous sera quasi-impossible d’y résister lors d’un voyage à Bahia.
Le Candomblé et la cuisine de Bahia, un lien fort
La culture afro-brésilienne a eu une importance capitale dans la construction du Brésil contemporain. En plus de 3 siècles d’esclavage, rites et cultes venus d’Afrique ont imprégné et modulé la société brésilienne, notamment à Bahia.
Le Candomblé est un des héritages majeurs de cette époque. Religion monothéiste et métissée, le Candomblé célèbre avec beaucoup d’énergie, plusieurs divinités appelées orixas, “énergie vitale”. Chacune de ces divinités est le symbole personnifié d’un élément naturel, l’eau, le feu, le vent, la terre, … etc. On compte au total 16 orixas, qui chantent, dansent, jouent de la musique, et mangent ! Ces divinités sont très humanisées, associées à des sentiments et émotions au cours des rituels. La cuisine est un élément essentiel dans la pratique de cette religion. Il n’existe aucune fête ni aucun rituel sans nourriture.
Le Candomblé est une religion de traditions orales, il n’existe aucun écrits sacrés ou de doctrine centrale. Il est issu de cultes africains variés, qui ont été ré-articulés par l’esclavagisme. Chaque peuple d’Afrique a sa propre divinité, sa propre orixa. Entre le XVIe et le XIXe siècle, toutes ces populations africaines étaient regroupées dans les mêmes senzalas (sorte de cabane de fortune où les esclaves étaient enchaînés). C’est donc dans l’inhumanité la plus totale qu’à surgi la captivante religion du Candomblé. Chants, danse, trance, ainsi que de nombreux rites et rituels, cette religion passionnante et passionnée est aujourd’hui pratiquée par plus de 3 millions de brésiliens. Les lieux de cultes sont appelés les terreiros et se trouvent généralement dans des maisons.
A l’intérieur du Candomblé on trouve plusieurs pratiques faisant références à différentes nations fondatrices. Les plus courantes au Brésil sont l’Angola, le Jeje, et le Ketu. Toutes ces nations possèdent leur liturgie, leurs battements de tambour, ainsi que leur dialecte.
Les orixas sont honorées à travers différentes offrandes alimentaires, le but est de nourrir leur axé, “force vitale”. La nourriture est le pilier de cette religion, l’acte d’offrir est son expression.
Mais attention, chaque orixa a ses goûts personnels, et on n’offre pas n’importe quoi à n’importe qui ! Par exemple, Iemanja, la déesse de la mer est honorée avec des plats fait à partir de mais blanc, ou de poissons grillés. Les mythiques acarajés sont offerts à Iansã, déesse du vent.
Les cultes et mythes afro-brésiliens au coeur de la gastronomie bahianaise
Dans la culture bahianaise, l’acte de manger permet de connecter les humains aux divinités africaines. A Bahia, il existe deux manières de préparer les plats, chacune est destinée à remplir deux fonctions différentes.
L’une a un rôle purement alimentaire. La nourriture est préparée avec toutes les saveurs nécessaires et se déguste dans la rue, les restaurants et les maisons. L’autre revêt une fonction symbolique et est offerte aux Orixas. Cette nourriture-ci est appelée comida votiva. Elle sera préparée de manière plus simple, dépourvue d’épices et d’assaisonnement, et est exclusivement destinée à un usage religieux.
On dénote d’une certaine prédominance féminine chez les orixas, ce qui fait lien avec les grandes figures de la gastronomie bahianaises, les baianas.
Initialement une nourriture de pauvre, le manioc est devenu très populaire à travers tout le pays, mais pas seulement.
Les Baianas et les acarajé, véritables institutions culturelles et sociales bahianaises
La féminité occupe une place centrale dans la culture gastronomique bahianaise. Les femmes sont une figure de force et de bonne fortune. Les Baianas sont un exemple très parlant. Si vous souhaitez déguster un acarajé dans les rues de Salvador, vous serez servi par des femmes très apprêtées et toujours souriantes ! Vêtues de larges robes blanches, de turban, et parées de plusieurs bijoux de couleurs vives, les Baianas assurent la confection et les ventes des acarajés dans tout l’Etat de Bahia. Leur allure et leur attitude chaleureuse sont tout aussi importantes que la qualité des acarajés !
Leurs vêtements sont caractéristiques des rites du Candomblé. Ils symbolisent leur appartenance religieuse, la force spirituelle et humaine qui leur permet de subvenir aux besoins de leur famille en se rendant dans la rue tous les jours pour vendre leurs mets.
Une fois par an, les Baianas sont célébrés dans les rues de Salvador. Depuis 2015, c’est un événement national, relayé par certaines villes brésiliennes. Cette journée s’apparente à un jour férié pour ces femmes qui travaillent chaque jour sans relâche dans les rues de Bahia pour satisfaire les gourmands. C’est alors l’occasion pour elle de se faire servir ! Chants, danses, défilés, sans oublier la nourriture, cette journée est clôturée dans les églises, où les fameux acarajés sont portés en procession pour recevoir la bénédiction du prêtre. Cette fête illustre très bien la considération spirituelle de la nourriture pour les bahianais. Une nourriture terrestre mais aussi céleste que l’on se doit d’honorer.
L’Acarajé est un symbole fort de la culture culinaire bahianaise. Il incarne à la fois la conquête et la liberté, ce qui ne plaît pas forcément à toutes les communautés religieuses brésiliennes. Dans les années 2000, un mouvement évangélique a tenté de rebaptiser l’Acarajé dans le but de faire disparaître la prédominance africaine de la culture bahianaise. Renommé bolinho de Jesus (petit gâteau de Jésus), cet acte a suscité beaucoup de tension entre les afro-brésiliens et les évangélistes. Suite à cet éclat et aux pressions des baianas, l’Acarajé a été reconnu comme Patrimoine Immatériel brésilien en 2005.